Soulever le voile de Mortis

"La femme ne s'exalte pas,
comme l'homme, face à la mort.
Parce qu'elle donne la vie,
elle accepte aussi la mort"
Marc Gendron
"La Fantasy a été crée et tuée" par Tolkien ont l'habitude de dire les spécialistes, ce qui est faux évident, mais en grande partie vraie aussi.
Cette constatation oblige en tout cas à concevoir différemment la Fantasy.
A l'origine de "Mortis", le postulat de départ fut de donner vie à un personnage emblématique, qui parlerait à tout le monde, et qui serait la "peur" centrale, l'opposition, la némésis, le grand ennemi du roman, et qui en serait le sujet principal.
Au contraire d'un récit écrit parce que l'auteur a eu l'inspiration d'une histoire précise, ici Paul Blanchot va partir uniquement d'un thème FORT, avec le souhait de révéler une histoire à nulle autre égale.
"Il était une fois un chevalier, brave et courageux, qui venait affronter la mort en face..."
Voilà la scène qui ouvre le roman, et qui va conduire le héros et l'écrivain très très loin de là où ils l'avaient prévu. Car au-delà de cette phrase, toutes les possibilités, toutes les éventualités, toutes les histoires étaient possibles, et il fallut laisser la plume écrire sa propre aventure et voir où cela la mènerait.
Un roman n'est jamais irrémédiablement figé (tant qu'il n'a pas atteint sa forme définitive), et celui-ci en particulier s'est considérablement enrichi de nombreuses années de travail, de recherches et d'investissement, comme vous le verrez ici !
A la croisée des mythologies

En Europe, nos histoires puisent souvent à l'une de ces origines mythologiques : gréco-romaines, celtiques, scandinaves ou judéo-chrétiennes.
La fantasy elle-même s'ancre souvent dans un de ces univers mythiques. Ici pour "Mortis", l'auteur a puisé dans des prénoms irlandais, chacun ayant sa propre signification pour donner de l'ampleur aux personnages, ce qui pose les bases d'un univers et d'un monde celtique :
- Ciarane, par exemple porte un prénom plutôt masculin, qui signifie "personne aux cheveux noirs",
- Ornoran, est lui un prénom plutôt féminin, qui signifie "honneur",
On retrouve deux noms à consonnance latine : "Mortis" et "Solaris, les deux entités les plus redoutables. Elevés au-dessus des autres, ils s'en distinguent par cet aspect-là :
- Solaris peut être traduit par "ensoleillé",
- Mortis, qui signifierait "des morts" peut être décrit d'une façon plus effrayante : "Perte définitive par une entité vivante (organe, individu, tissu ou cellule) des propriétés caractéristiques de la vie, entraînant sa destruction" (site Larousse).
Enfin certaines entités sont décrites par le nom commun qui les représente :
- Farceur, ou Echo, ou encore Jalousie,
L'univers qui est conté dans cette histoire est donc, on l'aura compris, basé sur une religion polythéiste, avec un vaste panthéon de dieux.
Cette fois, c'est en Amérique du Sud qu'il faut aller chercher l'origine de cette mythologie, chez les INCAS. Le pourquoi de ce fait sera expliqué plus loin dans cette exposition, ce qu'il faut souligner ici tient au choix fait par l'auteur de rechercher une vision différente de notre éducation judéo-chrétienne :
- Puisque l'on va parler de la mort, est-elle perçue de la même façon dans d'autres cultures ?
La réponse est OUI, évidemment. Cette vision différente va interpeler le lecteur pendant sa lecture, va peut-être le choquer, mais c'était tout l'objet de comparer, et de mêler, deux cultures dans le même roman.
On a tendance à ne percevoir notre culture que comme l'unique, la seule existante, aussi n'est-il pas inutile parfois de s'interroger sur d'autres façons de penser qui peuvent être tout aussi viables et acceptables !
Dernier mot là-dessus, le monde créé dans le roman permet aux Dieux de descendre sur terre. La proximité avec le monde d'en-haut en devient moins théorique, et donc plus tangible que dans notre culture.
Cet aspect fantastique, évidemment, se ressent dans les coutumes !

Comment a évolué le roman ?
Au quotidien, un auteur s'arme toujours d'un cahier ou d'un calepin sur lequel il va prendre des notes. L'histoire, tout au long des années qu'elle va mettre à s'incarner, va vivre et évoluer, grandir et s'enrichir de mille réflexions, analyses, ressentis et d'inspirations nées de fulgurances.
Les notes retrouvées au sujet du travail effectué pour "Mortis" ont été compilées ci-dessous :
LES GRANDES ETAPES DE L'HISTOIRE
A l'origine, le roman Mortis est publié en 2017 par les éditions L'ivre-Book (spécialisées dans les eBook, c'était le boom alors du livre numérique, pour lesquels les coûts sont moindres : il n'y a pas d'impression de livres, et moins de frais de distribution). Pour pouvoir proposer une histoire plus complète et dense, le roman originel avait été complété des quatre chapitres indiqués ci-dessous avec les astérisques.
Dans le chapitre où Nolan sert de piège ("Le cri d'une mère"), avant-dernier du roman en 2017, l'empereur Solaris trouve de l'aide auprès de nombreux autres Dieux qui lui sont féaux. Introduits si tard dans l'aventure, ces protagonistes méritaient d'avoir une partie consacrée à chacun d'eux, afin de lier tous les pans de l'histoire. C'est pourquoi l'itération de 2023 fait la part belle à ces adversaires redoutables !
Une autre scène, plus courte, a été rajoutée dans le chapitre "Libération et Malédiction", passage qui évoque les difficultés de Ciarane pour avoir un autre enfant. Si elle n'est pas citée, cette anecdote pointe du doigt le rôle caché de La Jalousie.
Enfin les deux chapitres "Conscience...", "Et trépas" apportent une deuxième fin à l'histoire, en faisant apparaître plusieurs manquements dont le chevalier porte la responsabilité. Bien qu'il n'en ait pas eu conscience, il lui reste de nombreux torts à réparer pour terminer son parcours de rédemption !
Itération du roman 2017
* L'appel des cloches
Mausolée souterrain
Le chevalier face à Mortis
Libération et Malédiction
Forêt de cristal et lac enchanté
Le mariage de Solaris
Le départ des 400 porteurs
La poursuite des pégases dorés
* Avea Mortis
Le combat face aux ours
En haut des escaliers célestes
Face à Haroc le taureau humain
Les terres nocturnes/montagnes noires
L'infini céleste
Prendre une tête d'avance
Retrouvailles et départ en guerre
* Le prix demandé par les Dieux
* Contraindre les porteurs de Dieux
La grande bataille
Le cri d'une mère
Interrompre le sacrifice de Mortis
Itération du roman 2023
Libération et Malédiction
* La cité des 1000 Dieux (Ailill la Furie)
Forêt de cristal et lac enchanté
Le mariage de Solaris
* Première rencontre (Cuallaid, chien sauvage)
Le départ des 400
...
Le combat face aux ours
* L'ascendance de Ciarane (Le centaure Adhamhan)
En haut des escaliers célestes
...
L'infini céleste
* Le ciel se voile (Enda, déesse des oiseaux)
Prendre une tête d'avance
...
Le cri d'une mère
* Les affres du tourment (La jalousie)
Interrompre le sacrifice de Mortis
* Conscience...
* Et trépas
Matériel promotionnel mis en place lors du lancement en 2017 :


Comme le roman n'était disponible qu'en Ebook, il ne pouvait être "vendu" lors des salons, le flyer visait à encourager
les futurs lecteurs à se procurer le livre, une fois rentrés chez eux.
La vision véhiculée lors de la 1ere version
En 2017, l'accent est mis sur le fait d'introduire le personnage de Mortis au sein d'un univers de Fantasy, avec cette phrase d'accroche : "La fantasy ploie sous le joug de la Mort". Il s'agit ni plus ni moins que l'idée de départ qui a lancé l'écriture du roman ! Cela est rappelé dans le flyer avec cette évidence : "Elle est la Mort, crainte autant par les Dieux que par les Hommes".
D'ailleurs la phrase suivante, même si elle amène plus de complexité à l'intrigue, évoque le même sujet : "Lorsqu'elle accède à la souveraineté du plus grand royaume terrestre, sa mainmise est sans pitié. Les masques tombent, des plans s'échafaudent dans l'ombre, et les tyrans ne seront pas forcément ceux qu'on aurait cru".
Que retrouve-t-on ici ?
- Encore une fois Mortis : elle est devenue souveraine, elle règne sans pitié, une métaphore qui ne laisse pas supposer qu'elle a transformé tout son royaume en zone de non-vie (voir les scènes d'ouverture du roman, dont l'un des intérêts est d'exposer le terrible destin qui est dévolu à cette terre et à ses habitants),
- Ensuite on parle de "masques qui tombent", si c'est littéralement le heaume du chevalier qu'il retire, c'est aussi, là par contre sur l'intégralité du roman, la face cachée de nombreux personnages, et autres divinités,
- "Les plans s'échafaudent dans l'ombre" couvre toute l'intrigue, avec beaucoup de rebondissements, tractations, pièges et tentatives de s'emparer du pouvoir de Mortis,
- Enfin lorsque l'on parle de "Tyrans", on oppose sans les nommer Mortis et Solaris, deux tyrans chacun à sa façon, que ce soit par avidité pour l'un, ou par vengeance pour l'autre, les deux puissances célestes ayant dévasté leur royaume !
Une 2ème version plus intimiste
Comme on peut le voir dans le trailer vidéo ci-dessous, le texte et le fondement profond du roman ont évolué. Il s'agit de la même histoire, et les éléments vus ci-dessus restent vrais et pertinents, et pourtant...
L'histoire s'est resserrée autour du trio des personnages principaux : la princesse et son destin maudit, le tyran Solaris et son avidité, et le chevalier pour lequel la phrase "sauver la femme qu'il a trahie" donne des indications qui ne figuraient pas jusqu'à présent dans la communication.
Certes l'entête sur Mortis est restée identique, mais en fait dans toute la communication elle sera remplacée par celle-ci : "Aurez-vous le courage d'affronter la mort en face ?". Cette phrase qui met en avant le chevalier lui-même (lecteur et chevalier sont réunis dans le même énoncé) porte en elle un double sens, puisque "affronter la mort en face" signifie accepter son destin sans trembler (souvent un destin funeste), alors que littéralement, elle évoque le fait d'affronter une entité qui s'appelle la mort, ce qui est le postulat de départ dont on a parlé.
Le chevalier porte dorénavant tout le roman sur ses épaules. Il est le personnage qui n'avait nul destin, et nulle place dans cette histoire, celui qui a subi, et ployé, et tout perdu alors qu'il avait jusque là une vie d'honneur et de courage. La phrase le lie intrinsèquement à sa princesse, celle "qu'il a trahie". Leurs deux destins maudits sont liés, et ne pourront se résoudre qu'on trouvant à apaiser les deux destinées.
La quête sera longue avant d'y parvenir...
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Le roman a reçu de très nombreuses et très bonnes chroniques à l'époque de son premier lancement. Si certaines sont reproduites ici c'est parce que la vision ressentie par les lecteurs apporte une jolie pierre à la compréhension du texte :
CHRONIQUE
"En personnifiant la Mort à travers Ciarane, Paul Blanchot en fait un personnage à part entière, qui ne se contente pas d'observer d'un œil passif le monde qui l'entoure, attendant que la vie quitte les êtres du Royaume Millénaire pour venir la rejoindre. Non, la Mort a décidé de prendre elle aussi sa revanche contre les Dieux, contre le monde qui l'a condamnée dans les ténèbres les plus profondes. Mais sans la vie, la Mort ne peut exister. Elle est elle aussi condamnée. Alors il va lui falloir mesurer ses ambitions. Quand s'arrêtera-t-elle ? Une fois lancée, peut-elle être arrêtée ? J'avoue m'être interrogée au début sur le titre du roman car le chevalier Ornoran apparaît bien comme le personnage principal. du moins, c'est ce que je me disais jusqu'à ce qu'au fil de ma lecture, je réalise qu'à travers ce personnage au courage exemplaire et à la ligne de conduite indéfectible, c'est bien de Mortis dont il est question. Ornoran et Ciarane ne sont que des prétextes pour aborder ce sujet et c'est à travers le regard du chevalier et de ses actions que le lecteur découvre l'immuabilité de la Mort".
Merci à Flower Panda ^_^
CHRONIQUE
"Les personnages peuvent être différents, par leur nature (hommes, dieux), leurs statuts, leurs pensées et leur vision par rapport à la situation chaotique du royaume. On y trouve une foule de sentiments et de thèmes en lien avec eux abordés, cependant les principaux restent ceux de la vie et de l’espoir. La Mort n’est pas que la grande ennemie de "Mortis", c’est aussi un personnage et un thème central, autour duquel on trouve les questions du désespoir, de haine, de souffrance. Comme a pu le dire Paul Blanchot dans une interview, la Mort est une ennemie connue de tous, ainsi cela parle à tous les lecteurs. Mais les choses vont plus loin, car incarnée dans une femme, elle devient un véritable personnage, elle n’est plus seulement un concept. De plus cette femme servant de réceptacle a son histoire, son passé et ses liens avec d’autres personnages, surtout celui du chevalier que l’on suit. Ce qui amène d’autres questions et problématiques à l’intrigue, l’enrichissant".
Merci à Ervael :-)
Puiser aux mythes incas
De 2010 à 2012, l'auteur reprend des études et passe un Master de Management de jeux vidéo, se spécialisant dans le Game Design, l'art de créer le projet central d'un jeu.
Parmi les cours qu'il va suivre, deux seront liés, car portés par la même professeure, à savoir les cours d'anglais et ceux sur les mythes. Chaque groupe de trois élèves se voit confié l'étude des mythes d'une civilisation différente, avec l'objectif d'apprendre à la connaître, et d'en adopter un concept en jeu vidéo.
Les mythes sont des thèmes fondateurs que l'on retrouve forcément dans n'importe quelle œuvre. L'un des exemples les plus connus en jeux vidéo vient de "God of War" (tous droits réservés), avec ces deux itérations autour de la Grèce antique, et plus récemment son portage au coeur dans les mythes germanophones et scandinaves.
Autre exemple, une histoire dans laquelle un fils va affronter son père, trouvera son origine dans le mythe d'Œdipe.
Dans "Mortis", l'auteur s'interroge sur le fait d'accepter de son plein gré un sacrifice humain. Son propre sacrifice.
C'est le cas du héros, Ornoran, qui est condamné à racheter sa faute devant son empereur, Solaris. On sait que le Soleil était la divinité principale pour les Incas, on ne s'étonnera plus de retrouver ce personnage au coeur du roman.
Ci-dessous, vous trouverez deux études sur un concept de jeu, situé au coeur de la vie des incas :
Enfin, pour les curieux ou ceux qui voudraient en savoir plus, avaient été compilées de nombreuses informations glanées un peu partout sur le web, probablement par wikipédia et des pages spécialisées. L'auteur avait acheté un livre assez dense sur cette culture particulière, dont on a beaucoup entendu parler, mais rarement étudiée dans le détail, afin de compléter les données pour le jeu :

Et les grecs alors ?
On n'échappe jamais aux références grecques ! Vous en retrouverez au moins cinq éléments évidents dans le roman, que ce soient des créatures magiques, divinités, ou éléments repris d'une épopée fameuse.
Saurez-vous en retrouver au moins trois ?
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Vous voilà rendu à votre point de départ. Nous espérons que cette exposition vous aura plu...
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